« t'es tranquillement en train de te balader sur le bord de la plage principale, en train d'penser à tes futurs bidouillages informatiques, quand tu sens une main imposante se poser sur ton épaule. Tu te retournes avant de voir un type que t'as déjà vu -sûrement un de tes clients- gonflé aux stéroïdes : "mec, rend moi mon fric tout de suite ou t'es mort" ton visage se crispe...c'est quoi la suite ? »



“vous devez vous tromper de personne monsieur, pardon, moi pressé“ dans un mouvement d’épaule fluide et calculé, Bart se dégage de l’emprise de son interlocuteur et envoie son pied gauche vers l’avant dans l’espoir de s’en tirer rapidement. Le type sur-musclé, ne souhaitant visiblement pas en rester, étend un peu plus son bras et l’attrape par le col cette fois-ci. Sans possibilité de contrôler son corps, il se retrouve sur le sable en un clignement de cils. Il était déjà grand lorsqu’ils étaient tous deux sur pieds, désormais il semblait immense. Sa masse musculaire imposante empêchait les rayons du soleil d’atteindre le jeune Ruskin, qui avait plutôt l’impression de parler à un esprit des ténèbres à cause du contre-jour.

Prenant son courage à deux mains, Bart prit fortement appui sur le sable, veillant bien à ne pas glisser sur une mini-dune de grains. Ses pieds stablement positionnés, il se releva très lentement à la force de ses jambes uniquement, afin de donner un effet de puissance et de croissance simultané. Lui qui était également assez grand du haut de ses 1m86, généralement il lui suffisait de prendre un air énervé pour que la démonstration fasse sensation. Une fois ses jambes pleinement dépliées, il arriva à cinq ou six centimètres de son opposant, qui était resté silencieux tout le temps de ce manège.

“eh petite pute, tu vas te calmer et repartir d’où tu viens. T’as pas vu au dos de ton permis de conduire, écrit en très petit : « aucun échange ni remboursement n’est effectué par le magasin » ? BOUGE !“ lui dit-il en poussant Mister Monde assez fortement.

Pendant une fraction de seconde, le grand blond semble un peu déconcerté, il n’a pas l’air de comprendre la scène qui se déroule à ce moment. Pour Bart, c’est la victoire, la danse de la joie dans sa tête puisqu’il sait qu’il a l’habitude de se sortir de telles situations par l’intimidation. Le fait est qu’il joue au poker avec sa vie, vu qu’il n’a aucune ressource en arts martiaux, et se bat comme une teuch’. C’est le genre de mec qui te mord le bras le plus fortement possible en dernier ressort, pensant que tu vas abandonner après (cette technique n’a jamais fonctionné).

“De quoi tu parles ? Je viens te voir pour mon macbook, soi-disant que je n’aurais plus de problème en te le filant, et maintenant j’ai dû en racheter un nouveau, j’ai perdu TOUTES MES DONNÉES ! Donc moi je te garantie que ton « magasin » a intérêt à me redonner mon fric“

Le bluff n’avait donc pas fonctionné. Sur laguna beach, les blonds bodybuildés se ressemblent tous, et la plupart viennent pour des permis de conduire ou des fausses cartes d’identité. Bart avait donc cru, à tort, que c’était l’un d’eux. En écoutant cette histoire, le type lui revient entièrement à la mémoire. C’est le gars qui avait sérieusement cru qu’il pouvait, en caressant « l’anus » du macbook (il avait juste montré le récepteur jack) avec un coton-tige humide, mettre fin à tous les problèmes qu’il connaissait. Pour cette petite arnaque, il s’était simplement inspiré des chiots à qui il faut le faire pour les déconstiper, il s’était trouvé particulièrement innovant pour ce coup-là.

“Ah oui, c’est toi ! Haha, pas de soucis, je te rends ton fric, pas de quoi s’énerver poto. Je t’avais pris quoi, trente balles ?“

En se rappelant de l’imbécile à qui il avait à faire, Bart ne trouvait pas utile de devoir risquer de se battre pour une poignée de billets, surtout que le type avait l’air coriace. Il mit la main dans sa poche arrière à la recherche de son portefeuille, et en sortit trois billets de dix.

“Non « poto », quatre cents trente balles.“ lui répondit-il.

*Ah ouais, je t’ai vraiment pouillé toi* pensa Bart très fortement, un petit sourire en coin. Une telle somme, il était hors de question de la lui rendre, et de toute manière il n’avait certainement pas tout cela sur lui. Il étudia les différentes options dont il disposait, et la fuite semblait un peu compromise à cause de son asthme (ce qui veut dire qu’il se ferait chopper après deux minutes de pointe). Il ne lui restait que le bluff alors…

“Quatre cents tre.. ? Nique ta mère ouais, tu m’as jamais filé autant de fric, tu veux m’enculer ? T’as cru que j’étais un pédé ou quoi ?“

Dans un mouvement faussement énervé, il remit son portefeuille dans sa poche arrière, et retira violemment son tee-shirt, exhibant son torse plutôt bien dessiné. Il avait beau être un geek en puissance, il s’était mis à la musculation en débutant son commerce pour justement faire face à ce genre de situation. Contractant ses pectoraux et soufflant comme un bœuf, l’énervement de Bart semblait plus vrai que nature. Il se rapprocha de son opposant jusqu’à pratiquement se coller, ils étaient si proches l’un de l’autre qu’ils pouvaient mutuellement sentir le souffle de l’autre. Les yeux écarquillés, la mâchoire serrée, Bart semblait prêt à en venir aux mains, alors que tout son esprit priait pour que le contraire arrive.

Un bruit sourd, en une fraction de seconde Bart fut plié en deux, mais résista en ne s’écroulant pas sur le sol. Il n’avait pas vu venir le coup de poings dans les abdominaux, et il aurait mieux fait de les contracter aussi. Sa respiration se coupe instantanément, il panique, ne tient plus et s’effondre sur le sable, la tête dans les grains. Il toussote, mais rien n’y fait, rien ne revient. Quelques secondes, libération, il aspire un grand coup, il se sent mieux mais mange un peu de sable au passage.

“Oh le fils de puuuuute..“ murmure-t-il sous le coup de l’énervement. Malheureusement, murmurer reste audible, ce qui anime la fureur de son adversaire qui revient à la charge. Il l’étale sur le sol, se mettant à califourchon sur le pauvre brun, et lui assène plusieurs coups au visage, dont la lèvre et le nez principalement. Sous la douleur, Bart se met à hurler, ou plutôt geindre vu qu’il ne pouvait pas trop articuler étant remué par la puissance des poings de son bourreau. Tentant de se défendre, il lui envoya quelques gifles puissantes, mais pas assez pour renverser son opposant qui gardait la pleine maîtrise du combat. On pouvait entendre des « arrête putain » entre plusieurs bruits sourds des phalanges contre son crane dur. Des passants voyant la scène et entendant le désarroi de Bart vinrent à sa rescousse, poussant le blond à plusieurs pour qu’il s’écarte. Enfin tiré d’affaire, mais le nez, la bouche et l’arcade très gravement ensanglantés, le jeune Ruskin se recula en rampant à vive allure sur le sable à environ un ou deux mètres, et lança son portefeuille.

“Prends tout putain, prends tout. Y’a environ trente-cinq balle, mais dégage putain.. han ma bouche, oh putain.. T’auras le reste, mais casse-toi !“

Les passants étaient visiblement choqués par la scène qui se déroulait sous leurs yeux, et pensaient avoir affaire à un racket. Le blond se leva sereinement, prit les sous du portefeuille, se rapprocha de sa victime qui reculait toujours en rampant et tenta de lui cracher dessus.. sans succès puisque la bave tomba sur son menton. Et c’est sur ce geste qu’il s’en alla, la bave sur le visage et le sang de Bart sur les poings. Les passants courageux se ruèrent ensuite sur Bart, analysant la gravité de son état : ses blessures étaient sérieuses. Ils appelèrent les secours mais pas la police conformément aux demandes du blessé de guerre. S’il l’autre con pensait qu’il allait obtenir un remboursement, c’est qu’il connaissait mal la bête, Bart comptait bien se venger en lui pourrissant la vie. Jamais il ne paierait, JAMAIS !




« Suite à ce reportage sur violence dans les beaux quartiers, notre jeune protagoniste Bart Ruskin a désiré s’opposer à cette extorsion et a refusé de donner « quatre cent putain de boules » (ses termes) à son tortionnaire. Il s’est fait « re-péter la gueule » (ses termes) et a finalement coopérer, en donnant les 395 dollars restants plus 200 dollars supplémentaires de frais d’attente pour mettre fin aux persécutions. Depuis ce jour, Bart Ruskin fait régulièrement appel à plus musclé que lui pour régler ses problèmes de remboursement, et ne se salit plus les mains. »