"t'es qu'un pauvre con el"

"ouais j'sais" t'essayes de répliquer naturellement. à vrai dire, ces propos sont précipités, tu ne sais pas réellement quoi dire. t'es mal assis sur ce foutu fauteuil à l'apparence douillette. tu lèves les yeux vers la personne qui te parle. l'intensité de la lumière derrière elle, te fait tourner la tête. tu n'aperçois pas tout de suite qui est en face de toi. t'as quoi salope à rester plantée là? il te colle une baffe. apparemment il n'a pas apprécié que tu le démasculinise. tu t'en fous, c'est qu'un connard de plus qui a essayé de rentrer dans ton carré vip. soirée de merde. mais comment est-ce qu'il connait ton prénom? merde. tu te dis qu'il y a un truc bizarre. t'as pas bien vu son visage, tu n'peux pas être sûr que tu ne le connais pas. nique ta mère fils de pute tu pousses le vice. tu le provoques un peu plus, pour observer sa réaction. tu flippes. t'as du mal à avaler la gorgée de mojito que tu viens de prendre, juste avant de l'insulter. il t'attrape par le poignet et te retourne contre le mur. tu ris. il te lâche en voyant la sécu arriver plus rapidement que prévu. j'suis désolé tu lui dis alors. parce que t'excuser pour rien, c'est ton truc ça. tu lui donnes un billet pour qu'il aille jouer ailleurs puis tu retournes t'assoir. tu bois. encore. toujours. tu finis ton verre, tu te lève. tu sors de la boite, seul. merde y'avait pas des pélos avec toi? pas le temps de se poser la question encore une fois. tu es dans ta bagnole. et tu roules. tu roules, saoul, imprudemment, quand ton téléphone sonne. il se déclenche automatiquement sur les enceintes de la voiture. t'es qu'un pauvre con el, tu m'as laissé toute seule, alors que tu m'avais promis de m'emmener chez toi! le bip du téléphone résonne beaucoup trop dans ta tête. merde. c'est la deuxième fois ce soir. tu es encore troublé, et tu ne fais pas gaffe à la route. tu manque d'écraser un connard de touriste qui s'était reculé pour prendre en photo sa gonzesse devant une grosse cylindrées. pauvre con! il te dit alors. mais qu'est ce qu'ils ont tous ce soir? tu roules de plus en plus vite, énervé par les évènements. en rentrant chez toi par la côte, tu t'arrêtes sur la plage. tu t'assois sur le sable encore mouillé et tu t'allumes une clope, histoire de faire passer le temps, et de ressembler à l'un de ces connards de poètes modernes qui pensent tout savoir sur la vie. alors tu fermes les yeux. la fumée dans tes poumons te fait du bien. tu mets sur ta tête la capuche du hoodie que t'as pris sur la banquette arrière de ta caisse. tu t'allonges sur le sable, et tu croises les bras. pourquoi t'es là? pourquoi tu fais ça? mais merde t'es bizarre comme mec. après tout, les autres ont peut-être raison, t'es qu'un con. t'agis comme un connard, tu les abandonnes. la liste de tes actes est bien trop longue pour pouvoir être énoncée. alors oui, au fond, t'es qu'un con. tu te le dis à toi-même, haut et fort. mais tu t'en fous, parce que c'est comme ça que tu es, et sans doute personne ne pourras te changer. // tu as dormi, sur cette plage. le jour se lève déjà, et des touristes te regardent bizarrement. tu regagnes rapidement ta voiture. un claquement de portière. le silence. tu n'entends plus que ta respiration, mêlées au lointain soupir de l'océan. bientôt, le grondement reviendras, et tu reprendras la route. tu iras là où on continueras à te dire que tu n'es qu'un con.