la soirée avait été parfaite. vodka, marlboros et coco, et tu planes loin au dessus des nuages. plus rien ne t'arrêtes, t'es libre, enfin. puis tu ries, comme un con, et tu marches titubant jusqu'à ta bagnole. t'as un monde psychédélique autour de toi mais tu trouves ça normal, ça t'fais marrer. tu proposes à la jolie brune qui t'as aguiché pendant toute la soirée de monter avec toi. elle pouffe de rire cette conne. pas ce soir karl... t'es trop déchiréééé. et tu ries toi aussi, tu ries avec elle parce que tu sais qu'elle a raison, tu sais que tu devrais pas prendre le volant mais c'est plus fort que toi. t'as envie de prendre ton envol. alors tu ouvres la portière et te glisses dans l’habitacle. il te faut dix bonnes minutes avant de mettre le contact et de faire rugir tous ces chevaux que t'as sous le capot. à cette douce musique tu souris. ce soir tu vas pouvoir partir loin, c'est sûr. alors t'appuies fort sur la pédale, avec toute la puissance dont t'es capable. ton bolide manque d'écraser quelqu'un, t'éclates de rire. wouhouuu j'vous aime les bitchs ! tu sais plus c'que tu dis. si t'avais pas inhalé toute cette merde tu t'foutrais certainement de ta gueule. mais là t'es trop loin pour t'en rendre compte, t'es heureux comme un gosse. et tu roules, tu roules sans t'arrêter. la californie défile à toute allure à travers tes fenêtres. mais tu fais pas gaffe à tous ces beaux paysages que tu connais par coeur. non, toi tu cherches la vitesse, tu te donnes des ailes. t'as l'impression d'être dans un de ces jeux vidéos qu'ont tous ces geeks qui t'font tant pitié. sauf que c'est réel, et que t'as pas de vie supplémentaire. mais c'est ça le plus excitant non ? et c'est là que tu les entends. ces sirènes. tu te prends pour ulysse en les en écoutant chanter. elles te détruisent, elles te consument. elles te filent mal au crâne, tu vas exploser. vos gueules ! tu sais plus quoi faire. une partie de toi te dis de t'arrêter, mais t'as peur. alors tu continues de rouler, toujours plus vite. tu sais que c'est mal, tu sais que c'est dangereux. mais ces flics veulent ta peau. tu conduis comme un malade, t'es drogué. ton compte est bon s'ils te mettent la main dessus. c'est au bout de cinq minutes de course effrénée que les choses se compliquent.y a un mur rouge et bleu qui se dresse en face de toi. et toujours ce bruit, incessant. tu donnes un coup de rage sur le volant, tu klaxonnes sans faire exprès. tu jures pendant dix secondes avant de piler devant la herse. c'est tout tremblant de rage que t'attends qu'on vienne te pêcher. tes émotions sont décuplées, tes sens aussi. t'as envie de crier, t'as envie de fuir encore une fois. mais t'as plus le choix et t'attends une éternité. un mec au cul plus large que ton ego tape à ta vitre. t'hésite à la descendre. sortez du véhicule. tu trembles encore plus. tu renifles bruyamment. t'es bon pour la garde-à-vue, direct. tu prends ton temps mais des nouveaux coups sur ta portière t'incitent à sortir pour de bon. ils allaient pas te rayer ta caisse en plus de ça. alors tu sors, tu lui fais face à ce gros tas de donuts transpirant de graisse. tu lui fais face et tu l'emmerdes. les papiers du véhicule. tu t'exécutes, t'as pas d'autre choix de toute façon. mais tu dis pas un mot de peur de raconter de la merde. tu lui donnes tout c'que t'as : permis, papiers, tu manques même de lui tendre une capote. il inspecte la paperasse, t'as envie de lui dire que t'as pas que ça à faire, d'attendre. mais tu te la fermes. bonne idée. puis le flic sort sa lampe torche et la pointe dans tes yeux. tu recules, instinctivement. tu t'apprêtes à faire une remarques mais l'autre te devance. vous rouliez à 150 sur une route limitée à 30, vous semblez avoir ingéré des substances illicites... que d'la merde. pardon ? vous racontez n'importe quoi. j'ai rien... j'ai rien pris ! c'est ce qu'on va vérifier... récitez l'alphabet à l'envers. tu réfléchis cinq secondes, mais tu sais que t'y arriveras pas. il est bidon votre test. même sans être drogué j'y arriverais pas. tu le vois ce rictus. tu vois qu'il est content le flic. puis tu te rends compte que tu t'es vendu comme un bleu. tu soupires. direction le poste jeune homme. tu râles. t'as pas envie d'y aller. non pas que ça t'inquiètes vraiment, tu sais que t'en sortiras au bout d'une nuit passée en garde-à-vue, tu payes les meilleurs avocats du coin pour ça non ? mais ça t'gave de devoir perdre ton temps pour ça. l'oiseau est pris en cage. puis en plus, t'es sûr qu'ils vont te la rayer ta caisse. c'est tellement des pauvres qu'ils feront pas attention.