soirée chez un type que tu ne connais pas, ça sent l'hypocrisie et le fric semble être l'organisateur de la soirée. Un mec s'approche de toi, te lance un sourire. "J'ai entendu dire que tu pouvais me refiler quelques trucs, à fumer, enfin pas la peine de t'faire un dessin, tu vois ?" il rapplique et essaye de t'acheter avec sa gueule. Tu réagis comment ?


“J'ai entendu dire que tu pouvais me refiler quelques trucs, à fumer, enfin pas la peine de t'faire un dessin, tu vois ?” Tu renifles ton sirop à la menthe en faisant rouler tes deux billes bleues sur l’inconnu. Taille moyenne, brun, yeux verts, voix grave, lèvres entrouvertes, canine chevauchant l’incisive –bordel c’est ton kiff ça-, gaulé comme un athlète grec, visiblement con comme un balai à en juger par son regard vide : tout à fait ton genre. T’es amoureux putain, t’as même le cœur qui s’emballe et tu t’demandes s’il va pas te provoquer une crise de panique à force d’étirer son sourire pour concurrencer les mannequins de pub pour dentifrice. Faut que tu passes en mode offensif là Donnie, bouge-toi la nouille mec. Celui-là tu l’laisses pas passer en lui récitant quelques lignes de poème apprises par cœur d’un livre audio. Faut t'la jouer Einstein. “La banquise a perdu 40% de son épaisseur en 40 ans, c’est flippant non ?” Ouais super, c’était brillant ça. T’as juste envie d’arracher la ceinture gucci de la grosse qui se trémousse contre un palmier pour la suspendre à la gouttière. La ceinture, pas la grosse. Pour te pendre. “J’comprends mieux pourquoi on t’appelle Donnie le zarbi. C’est mignon.” Le zarbi. Mignon. Toi tu retiens que le second mot, et tu souris comme une adolescente pré pubère à qui on vient de dire qu’elle a des seins agréables à tripoter. “Herbe, haschich, skuff ?” T’essaies de t’rattraper en causant comme un pro. “Le meilleur. Par contre c’est un peu la merde en c’moment niveau fric, j’ai déjà dépensé les biftons du mois en m’achetant une bécane, les priorités quoi.” Ouais tu comprends tout à fait, pauvre garçon. Il a l’air clairement gêné d’pas pouvoir te régler, tu l’vois à sa tête légèrement penchée sur le côté. Tu devrais peut-être faire pareil, toi qui n’sais jamais comment utiliser ton oseille. Le truc chiant, c’est que t’as jamais appris à piloter une moto. “Pas d’souci. Tu peux m’filer genre … ton t-shirt ?” Putain c’est le deuxième truc le plus con que t’es jamais demandé après un cheveu. Mais t’aimes bien l’inscription 'Bad Bull' avec deux toros qui s’enfilent. “T'es intéressé par un autre type de paiement à c'que j'vois. Y'a des méthodes plus directes pour m'foutre à poil tu sais ?” Il te souffle ça le plus naturellement du monde en faisant sauter le bouton de son futal, et t’as l’impression que tu vas tomber dans les pommes. Sauf que voilà, y’a un truc dans les plantes à 3 000 dollars qui ont accueilli le vomi de la moitié des participants qui te fait tourner le regard. “Oh …” Tu lâches alors que tes pupilles se mettent à briller devant le chaton au pelage sombre qui te mate fixement. Et là t’as tout oublié : le type, sa requête, ta gaule, son calbut Tommy Hilfiger à carreaux rouges et bleus –ouais, t’es observateur-. Tu t’accroupis pour éviter d’effrayer la bête, totalement captivé par ses grands yeux clairs. “Eh minou, minou, psttt.” Tu tends tes doigts près de la jambe du brun, esquissant le sourire béat du mec invité à un dîner d’cons. “Moi qui croyais qu’t’aimais pas les minous.” Tu n’captes pas qu’il fait une association entre le matou et les gonzesses, non en fait tu sembles tout étonné qu’on puisse penser une chose pareille de toi, toi le membre le plus assidu de trente millions d’amis. Ça te fait même te redresser légèrement alors que le félin vient se caresser au dos d’ta main. “Tu déconnes ? J’adore ça, j’en ai deux chez moi. Y’en a un qui boîte avec sa patte cassée et l’autre a un œil qui part complètement en couille le pauvre, il a dû s’prendre la pâtée. Le comble pour un chat.” Tu lâches un rire bruyant en perdant l’équilibre, te rattrapant à la jambe du type. “Pâtée, chat, tu piges ?” Ça lui arrache finalement un rictus légèrement crispé, mais ça suffit à t'rendre heureux. “Enfin j'allais pas les laisser crever dans la rue parce qu'ils sont repoussants, c'est dégueulasse de faire ça. Regarde cette soirée, y'a un tas de baleines qui ont été invitées et c'est franchement cool de pas s'fier aux apparences. Je l'dis à tout l'monde que c'est pas parce que t'es blindé que t'es pas quelqu'un d'bien, la preuve ouais, la preuve c'est qu'ils se focalisent pas sur le physique.” T'es à fond dans ton truc, mais l'animal revient à la charge. “D’ailleurs t’as vu le site porno pour chats qu’à ouvert cette américaine, un peu glauque quand même j'trouve. Je devrais peut-être tester un jour pour voir comment ils réagissent, m’enfin c’est pas non plus comme si …” La jambe du brun t’échappe des mains tandis qu’il s’éloigne en marmonnant un truc à propos d’un ‘débile’, et de ‘péter les dents’. Alors t’as les larmes qui t'montent aux yeux et tu te mordilles la lèvre parce que t’es déçu quand même, qu’il te brise le cœur comme ça. “Tu veux pas ta beuh ?” Tentative désespérée mais vaine de lui faire rebrousser chemin. Enfin au moins, tu t’es fait un nouveau pote.