les oiseaux chantent, une brise légère caresse ton corps dénudé, au loin on entend les vagues qui se cassent sur le sable fin. un sourire sur tes lèvres, tu ouvres les yeux sur cette journée et … mais attends … t'es où là ? et puis la meuf à côté de toi c'est qui ? hé mais … il s'est passé quoi hier soir braddah ?


Tu soupires longuement. T’as chaud, très chaud, trop chaud. Un rayon de soleil vient titiller ton visage. Mollement tu sens ton bras se soulever et s’abattre sur ta gueule encore endormie. Tu t’dis putain, quel con, t’as oublié de fermer les volets avant de te coucher. C’est une erreur d’amateur, ça te connait pas. Ca te soule, ça t’emmerde, t’es trop bien là. T’as clairement la flemme de bouger ton cul pour remédier à ce problème. Tu veux te rendormir, t’as l’impression qu’il est trop tôt. T’es encore à moitié dans le royaume des rêves, Junior. T’arrives pas à franchir ce cap, ouvrir un œil, rompre la magie. Rendors-toi, tu te dis. T’as encore toute la journée devant toi. T’as rien à faire aujourd’hui, comme hier, comme demain. Tu t’sens sourire, alors tu soupires à nouveau. T’es prêt à sombrer, encore. Tu sens même tes paupières se faire lourdes alors qu’une légère brise vient caresser ton visage. T’es content, au début. Ca te rafraîchit. Ca contraste avec la chaleur dérangeante du soleil naissant. Mais ça finit bien vite par t’emmerder. Tu t’sens émerger. Tes sens en éveil. T’entends le bruit des vagues. Bordel. C’est la première chose que tu te dis alors que t’ouvres enfin un œil. T’as presque un haut le cœur. Trop de lumière, trop de brutalité, trop de réalité. T’oses pas te redresser tandis que tu sens  un corps là, à tes côtés. Y’a pas de vagues, par chez toi. T’habites pas près de la plage. T’as pas le bruit de l’océan au réveil. T’es où Junior, putain ? Pendant deux secondes tu t’dis que t’es chez Yasmina. T’as du squatter là pour la nuit. Mais tu reconnais pas la pièce, tu reconnais pas son souffle. Et puis de toute façon, t’es à poil. Aux dernières nouvelles tu couches pas avec elle. Tu t’prends une baffe. Une baffe de réalisme. Mal de crâne. Qu’est-ce que t’as foutu hier soir, Jojo. C’est pas la première fois que tu te réveilles près d’un corps nu, c’est sans doute pas la dernière. Mais en général t’as des souvenirs, des images, des sensations. Là t’as rien. Rien d’autre que ton corps nu et le sien sous un même drap. Tu la sens bouger, tu tournes la tête et la dévisage. Tu t’sens voyeur, tu te demandes si elle se souvient de tout ça, elle. Tu la découvres, c’est pas un thon, ça te rassure. Tu te félicites de savoir bien choisir tes conquêtes, même dans les moments de blackout absolu. T’aimerais bouger, mais t’as aussi envie de gerber. T’essaies de calculer les probabilités. De te relever avec dignité. Parce que ouais, t’as de la dignité Junior. Tu te demandes si tu dois rester là, l’air de rien. Attendre qu’elle réagisse. Peut-être que vous allez remettre ça. Ca te paraît pas mal comme idée, ça te fait sourire. Pauvre con, Jojo. Tu sais pas quoi penser, tu sais pas ce dont t’as envie, tu t’sens limite schizophrène là tout de suite. Tu finis par te relever. Sans un bruit, sans un râle. Du moins, t’essaies. Tu t’approches de la fenêtre et tu mates un instant l’Océan. La salope se tape une belle vue. Tu t’en veux deux secondes plus tard de l’avoir traitée de salope, même si c’était que dans ta tête. Mais c’est vrai, putain, tu sais pas qui c’est cette fille. Tu sais juste qu’elle est bonne et que la vue de son corps nu te démange encore un peu. T’enfiles vite ton calbar et tu te passes une main dans les tifs. T’as la gerbe mais tu rêves d’un burger. Son sac traîne pas loin, tu lui piques 15$, trois clopes et un chewing gum que tu mâchouilles immédiatement. Tu finis par te rassoir sur le lit et tu fais exprès de bouger un peu trop pour la réveiller. Tu veux pas partir comme un voleur. Voleur que t’es. T’embarques un pochon plein qui traîne près d’une American Express Gold. Perds pas le Nord, Jojo. T’as eu le temps d’enfiler ton jean et tes pompes quand elle ouvre un œil. Tu lui souris, confiant. Elle s’affole pas la conne. Elle doit avoir des souvenirs plus nets que toi. Tu te laisses tomber à ses côtés et lui arraches un baiser prolongé. T’es pas con, tu veux profiter jusqu’au bout. Ta main glisse lentement sur sa cuisse et tu finis par te redresser.  " Bonne journée " tu lui murmures, ton souffle encore contre le sien. Tu croises son regard une dernière fois avant de choper ta chemise et de sauter par la fenêtre. Tu sais même pas pourquoi t'as sauté par la fenêtre. Tu t'dis que ça fait stylé. Les pieds dans le sable tu contemples un instant l'Océan avant de filer comme un enculé. T'as aucun souvenir de ta soirée, mais tu t'dis que c'est un peu la loi quand tu veux t'amuser, ici, à Laguna.